Oh lés, oh laids

Publié le par Emmanuel

Ca y est. J'ai mon visa, mon appart, mon Wifi, mon chien et mon téléphone portable avec appareil photo. Je suis installé dans ma cuisine, en train de regarder la neige qui tombe sur le parc, en bas. En face, il y a le "Triomphe Palace", une sorte de remoulage des gratte-ciel staliniens du coin, mais en plus grand.

En un mot, je suis installé dans un appart (cher) refait à neuf, bien confortable et bien situé, avec une salle de bain propre. Du jamais vécu, jusqu'ici, dans ma brève expérience de Moscovite. Quand je suis entré la première fois, ça sentait encore la peinture, c'est dire. Malheureusement, ça sentait aussi le papier peint merdique. J'imagine qu'il doit y avoir un atavisme qui pousse les Russes à s'entourer de papier-peints mauves avec des fleurs et de moquette marron. Même quand ils vont chez Ikea, ils trouvent le moyen d'acheter le pire, comme le canapé du salon, d'un magnifique gris satiné qui s'accorde à merveille avec mon téléphone vert tendre. Et après on s'étonne qu'ils votent Poutine.

Un truc qui ne change pas non plus, c'est les bousculades dans le métro. Quand on se retrouve à l'état de papier-accordéon humain, ça n'aide pas à la russophilie... Tiens, pas plus tard qu'hier je me suis fait rentrer dedans par une femme, alors que je portais dans un sac l'énième avatar de mon déménagement de Tbilissi - une quinzaine de kilos de livres. Mais je n'avais même pas eu le temps - ou la force - de lui asséner un regard assassin lorsque j'entendis dans mon dos une voix douce et bonne me dire : "pardon".

"Pardon". Ce mot mythique que les archéologues avaient redécouvert en 1812 sur les ruines fumantes de Moscou. Ce mot inutile qu'on n'apprend aux élèves des classes de russe que pour la bonne raison qu'ils ne sont pas Russes, justement. Ces quelques lettres auxquelles vous rêvez follement, en secret, encore dans les brumes de l'inconscience dans laquelle vous a plongé la quinzième porte dans la gueule de la journée.

L'apparition n'a duré qu'un instant. Emporté par la foule, je n'ai pu qu'adresser un sourire maladroit à la brave dame qui, emportée elle aussi par le flot des pékins se trémoussant d'un air mécanique jusqu'au magasin le plus proche pour acheter six oeufs, du pain et une bouteille de vodka pour les gosses, m'a regardé les yeux embués, le regard bouleversé par la cruauté de la vie, avant de disparaître de ma vue, avalée par la poix infâme des travailleurs pressés au teint pâle et au sexe racorni par des heures inquiètes d'attente compressée dans les wagons du métro. Elle était vraiment désolée.

Ca m'apprendra à dire du mal des Russes, tiens.
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C
Holala je trouve que tu lui accordes beaucoup d'importance à ce "blog minable" pour laisser autant de commentaires véhéments, ANNA! Laisse donc la place à ceux qui savent apprécier l'humour de ces billets. <br /> Voilà bien longtemps que je n'étais pas venu sur ton blog (oui moi j'étais restée sur celui de Tbilissi). Alors à quand la suite Emmanuel?...
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A
Hello<br /> <br /> La Russie est un pays avec des êtres merveilleux comme dans le monde entier mais malheureusement c'est toujours les Cons avec un grand C qui font le plus de bruit § Et le grand con à la tête d'un blog "minable" fidèle à la personnalité du bloggeur : tu as ton appart, ta wifi , un triple salaire et tu frequentes les bars etrangers ???, Pauv type materialiste bouffi de vent qui, se contentant d'une existence insignifiante et ennuyante a mourir... Moi nje moi je ... Tu te permets de juger une misère sociale avec des mots péjoratifs, éculés de condescendance,cette foule qui te supporte elle aussi dans le metro, qui t'accueille mais tu es incapable de juger ta propre misère spirituelle... Comme on te plaint !!!
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